Tout ce que dit Manon est vrai – Manon Fargetton
Quatrième de couverture :
Au centre, Manon. Autour, une ronde de personnages, qui projettent sur elle leurs peurs, leurs insécurités et leurs fantasmes. Ils croient la connaître mieux que personne. Ce sont ses parents, ses frères, son amie au lycée, l’homme qu’elle aime. Et ce sont eux qui vont raconter cette année où tout bascule parce que Manon, seize ans, entame une relation avec un éditeur de bande-dessinée de trente ans son aîné. Elle a du talent. Il va la publier. Ils s’aiment. La femme de l’éditeur aussi l’aime. Les lignes se brouillent, tout se mélange : l’histoire qu’ils vivent et l’écriture de la bande-dessinée, l’admiration, l’amour. Et le passé ressurgit soudain dans le présent. Rapidement, la mère de Manon refuse ce prétendu amour, cherche à protéger sa fille par tous les moyens, s’expose à la colère adolescente de celle-ci. Deux visions du monde s’affrontent. Deux visions de l’amour. Deux visions de ce que signifie être adulte. Et entre elles, d’autres voix, qui chacune renferme un morceau de la vérité. Et au centre, Manon.
Un coup de cœur surprenant…
Sélectionné dans le cadre du Prix du Roman Fnac pour lequel je suis ambassadrice cette année, Tout ce que dit Manon est vrai est paru aux éditions Héloïse d’Ormesson le 19 août dernier. Son auteure, Manon Fargetton, a déjà publié une vingtaine de romans.
Être jurée pour un prix littéraire, c’est sortir des sentiers battus, ouvrir l’œil sur un nouvel univers et s’émerveiller devant l’inconnu. Le roman de Manon Fargetton ne serait pas venu à moi sans cette expérience, je l’aurais, je crois, bien regretter.
Que se passe-t-il lorsque l’insouciance de l’âge nous incite à franchir les interdits ? Manon a 16 ans, elle est lycéenne et dessinatrice à ses heures perdues. Lors d’un salon du livre, elle rencontre Gérald, éditeur, prêt à travailler avec elle en publiant sa bande dessinée. Des échanges, initialement professionnels, se transforment rapidement en messages intimes. Un amour platonique naît entre la jeune adolescente et l’éditeur. Gérald est marié, il a près de cinquante ans et il entretient une troisième relation avec une autre jeune fille…
« Ils diront tous « je ». Ce « je », je leur emprunte, ou je leur vole, peu importe. Il est la rencontre de ce qu’ils m’ont raconté et de ce que nous avons vécu. Il est ce que tu as fantasmé, il est ce que j’en reconstitue. Ce ne sont pas leurs voix. C’est moi qui parle à travers eux. Moi qui te parle. J’ai tous les droits, tu sais. Parce que cette histoire m’appartient. Parce que tout est fictif et que rien n’est faux. Parce que toi et moi, Manon, on a toujours su mentir vrai. »
Malaisant, angoissant par moment, écœurant souvent, le texte de Manon Fargetton s’apparente à un thriller psychologique. L’éditeur, sa femme, la mère de Manon, ses frères ou son père, des amis, tour à tour chaque personnage devient narrateur et s’adresse directement à l’héroïne. Par leurs mots, nous suivons l’amour naissant entre Gérald et la jeune fille. Puis, l’emprise qu’il aura sur elle, aidé de son épouse ; les craintes et angoisses de la maman de Manon ; et les sentiments partagés de l’entourage familial et amical. Ainsi, chacun livre sa version des faits.
Sur le fil, l’écrivaine joue entre fiction et réalité. Est-ce son histoire qui se cache derrière les traits de cette Manon ? Petit à petit, le récit s’étoffe de prises de parole de la jeune femme. Des passages plus personnels, qui nous interrogent sur la véracité des actes énoncés.
Anorexie, adolescence, manipulation, sexualité, mensonge, Tout ce que dit Manon est vrai questionne sur le rôle de la justice, les réseaux sociaux, l’influence du pouvoir ou encore les relations parentales. L’auteure décrit aussi une époque et une génération, celles du début des années 2000, bien avant DSK, la vague me too ou #balancetonporc. Son roman n’est peut-être pas vrai, mais il dénonce, et le fait de façon brillante.
Un livre addictif et dérangeant, page turner comme on aime le dire, à ne pas laisser filer en cette rentrée littéraire.