Toucher la terre ferme, Julia Kerninon : Mon avis
Quatrième de couverture :
« J’étais là, un bébé parfait dans les bras, et mon corps déchiré. Dans mon orgueil comme dans mon innocence, j’ai pensé que tout s’arrêtait, alors qu’au contraire, tout commençait. »
Un soir de novembre, en pyjama sur le parking de la clinique, Julia Kerninon hésite à fuir. Son premier enfant vient de naître et, malgré le bonheur apparent, elle perd pied, submergée par les doutes et la peur des contraintes. Sa vie d’avant lui revient comme un appel au large : les amours passionnels, les nuits de liberté et les vagabondages sans fin.
Dans ce récit intime, Julia Kerninon plonge au cœur des sentiments ambigus de la maternité. Elle confie ses tempêtes intérieures : Comment être mère ? Comment rester soi ? Elle raconte cette longue traversée jusqu’à atteindre la terre ferme, où tout se réconcilie.
Le ton juste.
Julia Kerninon fait désormais partie de mes plus belles découvertes contemporaines. J’aime ses héroïnes de fiction et le rythme effréné de sa plume dans Liv Maria ou dans Sauvage. Mais un fait se confirme après la lecture de Toucher la terre ferme : l’écrivaine me touche davantage dans l’exercice du récit. Toucher la terre ferme est paru aux éditions de L’Iconoclaste en 2022.
L’idée lui a traversé l’esprit un quart de seconde sur le parking de la maternité. Courir, fuir, abandonner mari et enfant pour échapper à la réalité. Dans cet instant de bascule, qui fait de la femme qu’elle était – amoureuse, passionnée, écrivaine, etc. – une mère, Julia Kerninon sent la tempête arriver. Maintenant que ce bébé est là, que reste-t-il de la romancière ? Par où s’est échappée la passion vibrante de sa jeunesse ? Que garde-t-elle de l’amante libre et parfois infidèle qui sommeille en elle ?
Julia Kerninon n’a pas fui mais elle se souvient.
« Après la jeunesse, après la douleur, les erreurs, les tentatives, la tristesse, la folie, j’ai traversé la cascade. De façon presque imperceptible au début, j’ai cessé d’être un enfant, je suis devenue une mère. Je suis restée un écrivain. »
Dans un texte à la fois pudique et sans filtre, l’autrice raconte la maternité et ses chamboulements. L’anéantissement après l’arrivée du premier enfant et les doutes à la naissance du second. Ce bouleversement intérieur est l’occasion pour la jeune femme de revenir sur ses histoires d’amour passées et la passion qui l’animait alors. Ces confidences intimes rappellent les caractères libertaires et épicuriens de ses protagonistes.
La force des livres de Julia Kerninon résulte dans la justesse de son écriture. En moins de cent pages, Toucher la terre ferme condense avec précision les questionnements et les peurs d’une jeune mère. Jonché de références littéraires – comme ne peut s’empêcher cette grande amoureuse des lettres -, l’ouvrage est touchant et inspirant.
Et qu’on se le dise, ce témoignage s’apprécie tout autant sans connaître la maternité. Je ne suis ni écrivaine, ni mère, mais je n’ai cessé de m’identifier aux propos de Julia Kerninon.
A lire d’une traite.
A lire aussi : Julia Kerninon livre un récit tout aussi inspirant dans Une activité respectable. Elle y traite de son rapport à l’écriture et de son amour des mots. Je vous en parlais par ici.
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Connaissez-vous la plume de Julia Kerninon ?
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