Tenir sa langue, Polina Panassenko : Mon avis
Quatrième de couverture :
Elle est née Polina, en France elle devient Pauline. Quelques lettres et tout change.
A son arrivée, enfant, à Saint-Étienne, au lendemain de la chute de l’URSS, elle se dédouble : Polina à la maison, Pauline à l’école. Vingt ans plus tard, elle vit à Montreuil. Elle a rendez-vous au tribunal de Bobigny pour tenter de récupérer son prénom. Ce premier roman est construit autour d’une vie entre deux langues et deux pays. D’un côté, la Russie de l’enfance, celle de la datcha, de l’appartement communautaire où les générations se mélangent, celles des grands-parents inoubliables et de Tiotia Nina. De l’autre, la France, celle de la maternelchik, des mots qu’il faut conquérir et des Minikeums.
Quête d’identité.
Interpellée par ce premier roman lors de sa parution à la rentrée littéraire 2022, j’en avais oublié l’existence jusqu’à apercevoir sa jolie version poche en librairie. Me rappelant soudain les critiques enthousiastes lues à l’époque, je repartais le livre sous le bras. Signé Polina Panassenko, Tenir sa langue est paru aux éditions de L’Olivier, maintenant disponible chez Points.
C’est en voulant utiliser son prénom russe sur des papiers d’identité que Polina comprend que celui-ci lui a été retiré par l’administration française. Sans plus attendre, la jeune femme se lance dans une procédure juridique afin de récupérer le prénom reçu de ses parents à la naissance. L’occasion pour elle de se souvenir de ses années russes et de son arrivée en France.
Que disent de nous les noms et prénoms que l’on porte ? Que renvoie notre accent lorsque les mots sortent ? Que signifie maîtriser une langue ? En quittant la Russie pour la ville de Saint-Étienne, la famille de Polina fuit un climat politique compliqué, voire dangereux. S’ils sont unis et égaux dans leur statut de déraciné, chacun évolue différemment face à la langue française qu’il doit apprivoiser.
« Ce que je veux moi, c’est porter le prénom que j’ai reçu à la naissance. Sans le cacher, sans le maquiller, sans le modifier. Sans en avoir peur. »
Avec émotion, Polina Panassenko raconte l’apprentissage d’un idiome, la capacité à se fondre dans une nouvelle société et la nostalgie de ce(ux) qu’on laisse derrière nous. L’autrice revient sur son histoire familiale, multi-culturelle, et sa propre quête d’identité face à ce prénom effacé.
Dans ce récit teinté d’humour, Polina joue avec les mots. Dans ses souvenirs d’enfance, le russe se mélange au français. Le texte danse, porté par une musique mélancolique.
Du rire aux larmes, Tenir sa langue nous emporte, touchés par la sincérité de l’écrivaine. Sur moins de deux cents pages, la sensibilité de sa plume remue, flottant encore dans l’air après avoir refermé l’ouvrage. J’ai aimé cette voix à hauteur d’enfant, la détermination de la narratrice et son attachement, fidèle, à ses racines.
Polina Panassenko livre ici un très bel hommage à sa double culture.
A lire aussi : par sa thématique, le livre de Polina Panassenko m’a rappelé celui de Line Papin, Les os des filles, dont je vous parlais par ici.
________________
Ce livre vous tente ?
________________