Nos vies suspendues – Charlotte Bousquet
Note : 7/10
Quatrième de couverture :
Trois ans, déjà.
Trois ans qu’Anis court pour ne plus qu’on la rattrape.
Trois ans que Nora a préféré ralentir, pour s’arrêter de penser.
Trois ans que Milan s’en veut de n’avoir rien pu faire.
Trois ans que Steven a fermé les yeux, et qu’il avance dans le noir.
Cette nuit-là les a marqué à jamais.
Et chacun doit réapprendre à vivre, avec cette voix intérieure qui ne les quitte pas.
Cette voix qui ne cesse de grandir et qui ne s’arrêtera pas de parler. Pas tant que les coupables n’auront pas payé.
Alors que le passé ne leur laisse aucun répit, comment retrouver le fil de leurs vies suspendues ?
Mon avis :
Dans le cadre du festival Les mots en scène, qui se déroule en ce moment-même à Saint-Etienne, j’ai lu Nos vies suspendues, le roman de Charlotte Bousquet.
L’écrivaine est en dédicace ce vendredi de 13h à 19h, samedi de 10h à 19h et dimanche de 10h à 16h.
Tout le programme du salon est à retrouver ici.
En préparant cette chronique, je me suis souvenue que la plume de Charlotte Bousquet ne m’était pas inconnue. L’an dernier, j’ai lu Le jour où je suis partie, roman jeunesse sur le droit des femmes au Maroc, qui m’avait spécialement marqué. Les violences envers les femmes semblent interpeller l’auteure. Elle revient avec ce livre, Nos vies suspendues, plutôt destiné aux young adult, et aborde le sujet du viol.
Au soir du 14 juillet, Anis et son amie Nora sont victimes d’un viol en réunion. Influencées par les mauvaises personnes, elles ont bu et consommé de la drogue ce soir-là. La justice ne retiendra que cela : sous l’emprise de l’alcool, elles n’ont rien dit, ne se sont pas débattues. Sur les cinq garçons présents, seuls deux se verront écoper d’une peine de prison. Comment pardonner lorsque la justice ne reconnaît pas un crime ?
« Quand le magistrat a lu le verdict, j’ai dévisagé chacun des jurés pour graver leur visage dans mon esprit. […] En eux, je n’ai senti aucun regret, aucun doute : j’ai compris que c’était eux qui avaient contaminé les autres, les avaient persuadés que Nora et moi on racontait n’importe quoi, qu’on n’était pas des victimes mais coupables. »
La romancière n’épargne pas ses jeunes lecteurs. Avec un sujet aussi brutal que le viol en réunion, elle dénonce les violences faites aux femmes, et les manquements de la justice en France. La culpabilité a également toute sa place dans le récit. Si les jeunes filles n’arrivent pas à tourner la page à cause d’une mauvaise décision des juges, il en est de même pour les agresseurs qui n’ont pas pris leur responsabilité au moment d’avouer les faits. Comment vivre avec ce poids ? Le pardon est-il nécessaire pour faire son deuil ?
Les chapitres, dédiés à chaque protagoniste, donnent une forme narrative déconstruite et un récit un peu décousu. Des flash back viennent régulièrement alimenter le roman. Quelques passages en italique se glissent dans des paragraphes, nous laissant dans l’incompréhension. La plume de Charlotte Bousquet est néanmoins très efficace, l’envie d’avancer est présente sur toute la lecture. Le livre est un réel page turner.
Nul doute que Nos vies suspendues plaira aux plus jeunes. J’ai passé l’âge je crois pour y trouver un coup de cœur. Je regrette le côté surnaturel de la fin du récit. Le personnage d’Anis m’a toutefois beaucoup plu. A lire si vous aimez les histoires adolescentes, entraînantes et qui traitent de sujets graves à la fois.