Madeleine Férat – Emile Zola
Quatrième de couverture :
Ce n’est pas de volonté que manque Madeleine Férat mais plutôt de principes de base solides pour asseoir son jugement et choisir le bon chemin ou, s’apercevant qu’elle s’est fourvoyée, revenir en arrière sans prendre ses erreurs au tragique. Sinon, fuyant un tuteur abusif, elle ne se serait pas jetée dans les bras du premier venu et, surtout, n’aurait pas cru qu’elle était obligée d’y rester. L’habitude créant une sorte de bonheur, elle est désespérée quand Jacques la quitte pour s’en aller comme chirurgien militaire en Cochinchine. Elle se sent si bien engagée par cette union fictive et allègrement rompue par son compagnon qu’elle hésite à épouser Guillaume de Viargue quand celui-ci, après un an de liaison heureuse, la demande en mariage. Elle ne s’y décide que parce qu’elle a appris la mort de Jacques dans un naufrage – ce Jacques dont elle a découvert qu’il est l’ami de jeunesse de Guillaume. Quatre ans de bonheur se succèdent dans le domaine normand où le jeune couple vit retiré… jusqu’au jour où Jacques, miraculeusement sauvé, rentre dans leur vie. Alors le drame éclate chez ces deux êtres pris dans un piège que leur faiblesse transforme en fatalité.
« Madeleine sourit à son tour, de son bon sourire d’enfant tendre et aimante. Elle ne voyait plus la chambre, elle se sentait pénétrée d’une grande douceur par la demande caressante du jeune homme. Elle rendit à Guillaume son baiser. »
Mon avis :
En voulant préparer cet article, je me suis rendu compte que je n’avais jamais lu Émile Zola. Puis après réflexion, le titre de Thérèse Raquin, lu au collège, me revint en mémoire, publié étonnamment juste avant Madeleine Férat. En cette rentrée littéraire, la maison d’édition Le Chat Rouge a décidé de redonner vie à ce roman méconnu de l’auteur.
Après une enfance compliquée et abusée, Madeleine s’enfuit à la recherche du bonheur. Très vite, elle rencontre Jacques, avec qui elle va vivre une fougueuse passion. Mais celui-ci doit partir en Cochinchine et laisse Madeleine, seule et peinée. Quelque temps plus tard, elle croit avoir retrouvé le chemin de l’amour en rencontrant Guillaume de Viargue…
Lorsqu’on évoquait Émile Zola, j’avais en tête une écriture étouffante, pleine de descriptions pompeuses et écrasantes. Des pavés de plusieurs centaines de pages, sans rebondissements et qui, selon mes a priori, ne correspondaient pas à mes attentes de lectrice. Puis, Madeleine Férat est entré dans ma vie et a chamboulé toutes ces fausses idées.
Si le célèbre écrivain aime les passages descriptifs, ils ne sont en rien exagérés ni démesurés. L’auteur place le contexte avec justesse, il plante le décor en début de récit, puis en vient à l’action. J’ai apprécié son rapport à la nature, aux paysages et aux saisons qui apportent de la valeur ajoutée au désarroi de Madeleine et Guillaume.
C’est un roman sombre et enténébré, dans lequel la mort rôde et les esprits hantent les personnages. Émile Zola évoque Satan, le diable, la religion, les croyances et déploie un texte parfois funeste, triste mais jamais macabre. L’amour et les relations charnelles dévoilent aussi un romantisme dans les mots de l’auteur. Le récit est scindé en deux, entre le bien et le mal, les anges ou les démons, tels les quatre protagonistes.
Quelle heureuse surprise donc de redécouvrir la plume d’Émile Zola ! J’ai aimé le couple Madeleine/Guillaume, je m’y suis attachée. Et j’ai trouvé intéressante la dérive dans laquelle l’écrivain nous emmène. Un livre que je recommande, si le courage vous manque – comme à moi – de vous lancer dans la série des Rougon-Macquart. Une belle entrée en matière.