Madame S – Sylvie Lausberg
Note : 8/10
Quatrième de couverture :
L’anecdote est célèbre : alors que le président Félix Faure agonise, sa « connaissance » s’est sauvée par l’escalier de service. Cette mort en épectase va changer le cours de l’affaire Dreyfus et bouleverser le destin de celle que l’on surnomme depuis la « pompe funèbre »… Intriguée par cette « putain de la République », une journaliste recluse décide d’enquêter sur cette si mystérieuse Madame S. et sur les secrets d’un État français toujours aux prises avec les mêmes démons : antisémitisme, antiféminisme, petits arrangements entre amis et journaux avides de scandales.
Sylvie Lausberg livre un passionnant thriller historique sur les traces volontairement effacées de Marguerite Japy-Steinheil, personnalité troublante qui sauvera sa tête grâce à un art virtuose du mensonge, un charme dévastateur et une profonde intelligence politique, restés ensevelis sous des torrents d’injures misogynes qui en disent long sur notre rapport au sexe, au pouvoir et aux femmes qui en jouent.
Mon avis :
Les destins tragiques vous fascinent-ils ? En littérature, les vies romanesques me passionnent. Quand j’ai découvert l’histoire de Madame S, à travers la quatrième de couverture du livre de Sylvie Lausberg, je savais que cela allait me plaire.
La journaliste clôt vingt ans de recherche sur la vie de Marguerite Steinheil, maîtresse de Félix Faure. L’ancien président de la République serait décédé dans ses bras, après un moment d’intimité. Quelques années plus tard, son mari et sa mère sont assassinés par des malfaiteurs, Marguerite sera alors accusée.
« A dix-sept ans, elle fait son entrée dans le monde, au bal des officiers, à Belfort. Dans une simple robe de tulle bleu, elle avance au bras de son père, ses longs cheveux sombres parsemés de fleurs de pommier. Durant la soirée, rivé à sa table, Edouard Japy embrasse toute la salle d’un coup d’oeil et ordonne à Meg de ne danser qu’avec son frère Julien, exclusivement ! Les prétendants se pressent pourtant, le père fait barrage. Meg n’y voit pas malice, car elle aime déjà. L’élu est l’ami d’enfance de son frère Julien et son compagnon d’armes : le joli lieutenant Scheffert. Prénommé Edouard, comme papa. »
Quand une biographie se fond à un roman historique, un livre passionnant voit le jour. Madame S, c’est la destinée hors norme d’une courtisane devenue célèbre à cause de son appétit sexuel. C’est aussi tout un pan de notre République revisité derrière l’anecdote de la mort du président. L’auteure s’intéresse à la France sous Félix Faure. Puis, de façon très détaillée, à l’affaire Dreyfus. Mais elle évoque longuement également un autre homme politique : Aristide Briand. Ce début du siècle est mouvementé chez Marguerite Steinheil, comme il l’est pour de nombreux français avec ces affaires à rebondissement.
Avec le meurtre du mari et de la mère de Marguerite, le texte bascule sur une véritable enquête de la part de l’écrivaine. Moins de faits politiques, nous suivons le procès de la triste femme comme un vrai page turner. Le roman reçoit un second souffle.
Derrière les aventures de Madame S, se cache un véritable récit historique enrichissant. Sylvie Lausberg a travaillé son sujet, peut-être trop parfois, nous détaillant chaque rebondissement, et nous énonçant les témoins à la pelle. Quoiqu’il en soit, le personnage de Marguerite est surprenant, délicieux et idéal pour une adaptation au cinéma. Étonnant qu’un réalisateur ne se soit pas encore penché sur son cas…!