L’homme que je ne devais pas aimer, Agathe Ruga : Mon avis
Quatrième de couverture :
« Il y a un an, je suis tombée amoureuse comme on tombe malade. Il m’a regardée, c’est tout. Dans ses yeux, dans leur promesse et ma renaissance, j’étais soudain atteinte d’un mal incurable ne laissant présager rien de beau ni de fécond. Son regard était la goupille d’une grenade, un compte à rebours vers la mort programmée de ma famille. »
Ariane, heureuse en mariage et mère comblée de trois enfants, fait la rencontre de Sandro. Cette passion se propage comme un incendie et dévore peu à peu les actes de sa vie. Ariane est en fuite. L’amour pour son mari, l’attention à son entourage, à la littérature dont elle a fait son métier, sont remplacés par des gestes irrationnels, destinés à attirer l’attention d’un quasi-inconnu.
Quels démons poussent Ariane vers cette obsession adolescente ? Quels pères, quels hommes de sa vie ce jeune roi de la nuit ressuscite-t-il ?
Un roman fulgurant.
Dans quel piège me suis-je fourrée ? M’aventurer dans la lecture du roman d’une « collègue » blogueuse, l’une des plus talentueuses que j’ai à connaître, et qui lira à coup sûr ma chronique… Le livre n’est pas encore ouvert, pourtant mon cerveau réfléchit déjà aux mots qu’il aura à poser sur le clavier. L’homme que je ne devais pas aimer d’Agathe Ruga est paru en avril dernier aux éditions Flammarion.
Un regard, puis tout bascule. Entourée de son mari et de ses filles à la terrasse d’un café un dimanche midi, Ariane n’imagine pas le tremblement de terre qui s’annonce. Trois mots échangés avec le serveur ce jour-là suffisent à la broyer tout entière. Une phrase, comme une obsession, l’amenant au désir et à la passion d’un homme : Sandro.
Aimée, comblée et parfois même enviée, on dit des femmes comme Ariane qu’elles ont « tout pour être heureuse« . Alors, pourquoi ? Pourquoi cette urgence à fuir ? Pourquoi cette flamme, incandescente, pour ce jeune homme ? Si sa jeunesse l’attire, lui n’aura de cesse de repousser la mère de famille qu’elle représente. Sandro n’est pas un briseur de couple. Contrairement à ce qu’elle en dit, il n’a rien à lui apporter.
« Je ne le vois pas encore mais je perçois le bruit de ses bottines, il martèle le sol, mon cœur et ma vie et je ne m’y fais pas, ma gêne décuple mon excitation, je croise et décroise mes jambes pour me donner une contenance. Je m’étais juré de ne plus venir. »
A la fois ardent et émouvant, le récit d’Agathe se consume à l’image de l’histoire d’amour furtive décrite entre les deux personnages. Un rythme fou, rappelant l’urgence pour l’héroïne à fuir son quotidien, et l’appétit dévorant qu’elle ressent pour cet inconnu. Une immédiateté, précisément dépeinte dans le ton choisi.
L’insatiable envie de plaire (et d’aimer) d’Ariane se trouve-t-elle dans les souvenirs de l’enfance ? Comme pour justifier un schéma familial reproduit instinctivement, l’autrice revient à la source. Son grand-père, son père, et les beaux-pères de sa vie s’invitent au cœur de l’autofiction. Autant d’hommes aimés, qu’elle retrouve en Sandro.
Ce roman court et intense vient confirmer le talent d’écrivaine d’Agathe. J’aime ses mots et sa musique. J’aime son courage ou son audace à se livrer au jeu du récit. J’aime ses héroïnes et leurs ivresses. Alors, malgré l’anxiété d’écrire sur ses ouvrages, je ne louperai pas les prochains.
Le premier roman d’Agathe Ruga, Sous le soleil de mes cheveux blonds est à retrouver en livre de poche.
Aimez-vous les auto-fictions ?