L’heure des femmes, Adèle Bréau : Mon avis
Quatrième de couverture :
Paris, 1967. À l’aube de la cinquantaine, Menie, mère de famille bourgeoise, est recrutée par la radio RTL qui a décidé de renouveler ses programmes. Son rôle ? Faire parler les auditrices. En quelques semaines, c’est la déferlante. Les femmes de la France entière se confient à « la dame de cœur ». Bientôt, à l’heure de la sieste, elles seront des millions à suivre l’émission avec passion. Parmi elles, Mireille et sa sœur Suzanne, qui découvrent qu’elles aussi pourraient maîtriser leur destin. Quant à la vie de Menie, partagée entre le tourbillon d’une société libérée par Mai 68 et les tourments qu’on lui livre, elle en est totalement bouleversée. Cinquante ans plus tard, Esther, une documentariste qui peine à se reconstruire, va replonger dans ces années pas si lointaines où le sort des Françaises semble d’un autre âge.
Heureux gagnant !
Pour la deuxième année consécutive, l’équipe du réseau Maison de la Presse m’a fait confiance en me nommant jurée pour la 54e édition de leur prix littéraire. Après des semaines de lectures passionnantes, après des débats enflammés au côté de la présidente Tatiana de Rosnay lors des délibérations, c’est l’écrivaine Adèle Bréau qui a remporté le prix pour son roman L’heure des femmes paru aux éditions JC Lattès ! Ce nouvel opus signe mes retrouvailles avec l’autrice, après la lecture de Haute saison en 2021.
Forte de son succès dans la presse féminine, Menie Grégoire est appelée par le directeur de RTL pour animer une émission de radio. Nous sommes en 1967, la journaliste a bientôt cinquante ans, trois grandes filles indépendantes, un mari influent et l’envie urgente de donner la voix aux femmes.
Chaque jour, à l’heure de la sieste, Menie écoute et conseille ces mères au foyer fatiguées, ces jeunes épouses inquiètes, ces adolescentes en quête d’information. Des générations et classes sociales variées, unies derrière leur poste de radio, dans lequel, grâce à Menie, la parole se libère. Très vite, ses discours engagés dérangent, parfois au sein même de son entourage. Mais la force de la présentatrice n’en devient que plus vive, la motivant à continuer son engagement.
« Je crois que ça aurait plu à Menie, cette histoire de ricochets. Elle qui aimait tant les rivières. Oui, je crois qu’elle a lancé un premier caillou qui a continué de rebondir ensuite, inlassablement, de femme en femme, de mère en fille, de sœur en sœur. »
Figure médiatique importante dans les années 70, méconnue des nouvelles générations, Menie Grégoire était la grand-mère d’Adèle Bréau. Quelques années après la déferlante #metoo et la libération de la parole, et alors qu’apparait le recul de nos droits dans certains pays, l’autrice déploie un récit féministe modéré, entre document historique et fiction contemporaine. Mêlés au portrait de Menie Grégoire, des extraits de courriers reçus par les auditrices rappellent le contexte de l’époque. En parallèle, l’écrivaine raconte l’histoire de Mireille il y a cinquante ans et d’Esther en 2021, qui croiseront le chemin de Menie chacune à leur manière.
Désir féminin, contraception, sexualité, avortement, éducation des enfants, les thèmes abordés par la journaliste à l’antenne sont nombreux et intemporels. Que l’on soit né en 1950, en 1980 ou en 2000, il est facile de se retrouver dans les doutes et questionnements de ces héroïnes attachantes.
Si le nom de Menie Grégoire ne m’était pas totalement inconnu, j’ignorais tout de son parcours. J’ai aimé découvrir le destin de cette grande dame, portée par la plume animée de sa petite-fille. L’heure des femmes est de ces lectures utiles, à partager sans modération, pour que toujours, notre voix compte. J’espère, grâce au prix Maison de la Presse tout juste décerné et amplement mérité, voir cette transmission naître un peu partout.
A lire aussi : l’an dernier, Sophie de Baere remportait la 53e édition du prix Maison de la Presse avec son roman Les ailes collées. Paru au format poche il y a quelques semaines, ce livre reste mon plus gros coup de cœur pour l’année 2022.
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Connaissiez-vous Menie Grégoire ?
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