Le gardien de Téhéran, Stéphanie Perez : Mon avis
Quatrième de couverture :
Printemps 1979, Téhéran. Alors que la Révolution islamique met les rues de la capitale iranienne à feu et à sang, les Mollahs brûlent tout ce qui représente le modèle occidental vanté par Mohammad Reza Pahlavi, le Chah déchu, désormais en exil. Seul dans les sous-sols du musée d’Art moderne de Téhéran, son gardien Cyrus Farzadi tremble pour ses toiles. Au milieu du chaos, il raconte la splendeur et la décadence de son pays à travers le destin incroyable de son musée, le préféré de Farah Diba, l’Impératrice des arts. Près de 300 tableaux de maîtres avaient permis aux Iraniens de découvrir les chefs d’œuvre impressionnistes de Monet, Gauguin, Toulouse-Lautrec, le pop art d’Andy Warhol et de Roy Lichtenstein, le cubisme de Picasso ou encore l’art abstrait de Jackson Pollock. Mais que deviendront ces joyaux que les religieux jugent anti islamiques ? Face à l’obscurantisme, Cyrus endosse, à 25 ans à peine, les habits un peu grands de gardien d’un trésor à protéger contre l’ignorance et la morale islamique.
Quand la réalité se mêle à la fiction.
Les mots de Stéphanie Perez sur le plateau de C à vous en mars dernier m’avait donné envie de lire Le gardien de Téhéran (éditions Plon, 2023). Quelques semaines plus tard, j’apprenais que son premier roman faisait partie de la sélection finale du prix Maison de la Pressepour lequel j’étais jurée. J’allais pouvoir me lancer dans sa lecture.
Téhéran, été 1977. L’impératrice et épouse du Shah d’Iran, Farah Pahlavi, passionnée de peintures contemporaines, crée le musée d’art moderne de la ville. Une équipe d’experts est établie pour la mise en place de ce gigantesque projet. Âgé de 25 ans, le jeune Cyrus est embauché pour la livraison des tableaux. Deux ans plus tard, le couple impérial est renversé par la révolution et doit s’exiler. Cyrus devient alors le gardien du musée.
Écœurés par l’étalage des richesses au plus haut sommet de l’Etat et n’en pouvant plus de sa police politique, les Iraniens renversent le pays, appelant au retour de l’ayatollah Khomeyni. Avec le changement de régime, les citoyens espèrent retrouver leurs droits et gagner en qualité de vie. Démarre alors la république islamique et, pour le peuple iranien, la désillusion.
« Cyrus reste muet, il n’a jamais entendu parler de ce peintre capable de déclencher de telles émotions, mais pour une raison qu’il ignore, les larmes lui montent aux yeux. Pleurer devant un tableau, quelle expérience inattendue ! Mais oui, il est submergé par des sentiments inconnus, cette œuvre lui parle et le bouleverse au plus profond de son être, il sort son petit carnet noir et note discrètement le nom de cet artiste New-yorkais sur lequel il se promet de se renseigner. Il comprend pourquoi l’art peut devenir la passion d’une vie. »
Derrière le personnage fictif de Cyrus se cache l’histoire vraie du gardien du Musée d’Art contemporain de Téhéran. Celui d’un homme futé, qui mentira aux hommes de l’ayatollah pour sauver les dizaines de tableaux cachés dans les sous-sol du musée. Picasso, Gauguin, Monet, Warhol : autant de chefs d’œuvres protégés depuis plus de 30 ans. Rencontré en 2016 dans le cadre de son travail de journaliste, Stéphanie Perez s’est inspirée de son parcours incroyable pour livrer un récit original et pertinent.
Héros attachant, Cyrus s’émerveille et s’instruit chaque jour aux côtés de ces peintures. Lui qui ne vient pas du monde de l’art prouve le pouvoir et la force de ces tableaux. L’art est pour tous. Les musées sont ouverts à tous. Lisant son émotion face à une œuvre, j’ai reconnu la mienne lorsque je foule le sol d’un lieu culturel.
Au-delà de la thématique artistique qui me tient à cœur, Stéphanie Perez met en lumière l’Histoire d’un peuple bafoué dont j’ai lu peu de choses dans la littérature occidentale. Le portrait de Cyrus renvoie à la triste actualité du pays et, notamment, à la condition des femmes.
Un livre réussi qui mérité d’être lu et porté. Bravo à son autrice !
A lire aussi : la semaine dernière, je vous parlais d’un autre premier roman sélectionné pour le prix Maison de la Presse : La jurée de Claire Jéhanno. Une belle découverte à encourager également !
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Quel(s) autre(s) roman(s)s me recommandez-vous autour de l’Iran ?
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