Le bal des folles – Victoria Mas
Note : 7.5/10
Quatrième de couverture :
Chaque année, à la mi-carême, se tient un très étrange Bal des Folles. Le temps d’une soirée, le Tout-Paris s’encanaille sur des airs de valse et de polka en compagnie de femmes déguisées en colombines, gitanes, zouaves et autres mousquetaires.
Réparti sur deux salles – d’un côté les idiotes et les épileptiques ; de l’autre les hystériques, les folles et les maniaques – ce bal est en réalité l’une des dernières expérimentations de Charcot, désireux de faire des malades de la Salpêtrière des femmes comme les autres. Parmi elles, Eugénie, Louise et Geneviève, dont Victoria Mas retrace le parcours heurté, dans ce premier roman qui met à nu la condition féminine au XIXe siècle.
Mon avis :
Difficile de passer à côté du « phénomène » Victoria Mas à la rentrée de septembre dernier. Si vous suivez un peu l’actualité littéraire, vous avez forcément entendu parler de son premier roman, Le bal des folles, acclamée par la critique. Le livre a depuis reçu le Prix Renaudot des Lycéens en 2019. Quelques mois ont passé et je me suis enfin décidée à m’y plonger.
1885, Paris, hôpital de la Salpêtrière. Le professeur Charcot réalise chaque semaine des expériences médicales sur des jeunes femmes fragiles et perdues, devant un public en admiration. Celles qu’on appelle communément les « folles » sont le plus souvent envoyées dans cet asile par leur famille pour démence, homosexualité, ou pensées farfelues. C’est le cas d’Eugénie, qui y entre contre son gré à l’aube du futur bal de l’année…
« Le père Cléry tend les paiers signés à Geneviève. Elle jette un coup d’œil aux documents, puis regarde l’homme.
– Puis-je vous poser une question?
– Je vous en prie.
– Pourquoi faire interner votre fille, si vous n’attendez pas qu’elle soit soignée. Nous ne sommes pas une prison. Nous œuvrons à guérir nos patientes.
…
– On ne converse pas avec les morts sans que le diable y soit pour quelque chose. Je ne veux pas de cela dans ma maison. À mes yeux, ma fille n’existe plus. »
Reflet d’une époque disparue, Le bal des folles met en lumière ce pan malheureux de l’histoire de la médecine en France au XIXe siècle. Victoria Mas s’intéresse à un sujet méconnu dans la littérature contemporaine, celui de ces jeunes femmes enfermées pour folie, et traitées comme des bêtes de foire à chaque expérimentation. Eugénie, personnage principale du récit, en est la triste victime depuis son arrivée à la Salpêtrière.
Et, comme si tout cela n’était pas suffisant, un bal est organisé une fois par an où les malades se parent de leur plus beau déguisement et l’hôpital ouvre ses portes au tout Paris. Une grande soirée qu’Eugénie et ses camarades préparent avec impatience.
Ce bal des folles, nous l’attendons durant toute la lecture du roman. Erreur sur la marchandise ou coup marketing ? L’auteure aborde surtout la liberté entravée de ces femmes, le destin brisé d’Eugénie, l’abandon familial. Son écriture fluide nous entraîne très vite mais le récit manque de profondeur. Le sujet, intéressant et novateur, choisi par Victoria Mas, méritait un développement plus élaboré.
Je me suis attachée à ces femmes, je me suis demandée quelle aurait été ma place, ma réaction, mon comportement à cette époque. Le bal des folles dénonce des pratiques honteuses et heureusement plus d’actualité dans le corps médical français aujourd’hui. Je suis néanmoins restée sur ma faim avec ce texte aux allures de nouvelle. Victoria Mas publie un premier ouvrage prometteur, mais à mon sens, loin des éloges lues et entendues à son sujet. Je serai curieuse quoiqu’il en soit de voir ce que nous réserve la romancière pour la suite.