L’américaine & Et la vie reprit ses cours, Catherine Bardon : Mon avis

Bardon Catherine - Éditions : Les escales
23 novembre 2021
6Commentaires

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Après mon coup de cœur pour Les déracinés de Catherine Bardon découvert il y a quelques mois, je me suis plongée dans les seconds et troisièmes tomes déjà parus : L’américaine, suivi de Et la vie reprit son cours.

Aujourd’hui ce n’est pas UNE chronique que je vous propose, mais bien deux avis dans le même article. 😉

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L’américaine

Septembre 1961. Depuis le pont du bateau sur lequel elle a embarqué, Ruth tourne le dos à son île natale, la République dominicaine. En ligne de mire : New York, l’université, un stage au Times. Une nouvelle vie… Elle n’en doute pas, bientôt elle sera journaliste comme l’était son père, Wilhelm.
Ruth devient très vite une véritable New-Yorkaise et vit au rythme du rock, de l’amitié et des amours. Des bouleversements du temps aussi : l’assassinat de Kennedy, la marche pour les droits civiques, les frémissements de la contre culture, l’opposition de la jeunesse à la guerre du Viêt Nam…
Mais Ruth, qui a laissé derrière elle les siens dans un pays gangrené par la dictature où la guerre civile fait rage, s’interroge et se cherche. Qui est- elle vraiment ? Dominicaine, née de parents juifs autrichiens ? Américaine d’adoption ? Où va-t-elle construire sa vie, elle dont les parents ont dû tout fuir et réinventer leur existence ? Trouvera-t-elle la réponse en Israël où vit Svenja, sa marraine ?

 

« Je partais. C’était ce que je voulais et c’était un déchirement. J’étais là, seule, sur le pont d’un paquebot en partance. Sonnée par la mort idiote de mon père, j’avais pris la décision d’abandonner mes études, de quitter ma famille et me lancer dans l’inconnu. »

 

Trouver sa place…

Suite au décès accidentel de son père, Ruth peine à trouver sa place dans cette vie dominicaine qu’elle n’a pas choisie. En 1961, tout juste adulte, la jeune femme monte à bord du paquebot qui l’emmène droit vers New York où l’attend, elle en est persuadée, une grande carrière de journaliste. Elle y rejoint Nathan, son neveu adoré, et loge chez son oncle et sa tante.

Mais émigrer aux États-Unis en fait-elle une Américaine ? Qu’en est-il de ses racines autrichiennes, pays de naissance de ses parents ? Doit-elle partir en terre judaïque ? Mélangée parmi toutes ces cultures, Ruth se sent perdue.

Dans un récit captivant, Catherine Bardon dresse le portrait d’une héroïne cultivée, libre et féministe. Après l’histoire passionnante d’Almah et Wilhelm dans le premier volet, l’auteure s’intéresse ici à Ruth, leur aînée. Entre ses études de journalisme, son amitié avec Arturo rencontré sur le bateau, un voyage au Mexique, son séjour dans un camp Kibboutz et sa nouvelle vie New-yorkaise, la jeune fille vivote, cherchant sa maison. Elle qui maîtrise bientôt quatre langues en vient à oublier sa langue maternelle.

J’ai dévoré les près de six cents pages offertes par l’écrivaine, m’identifiant à cette jeune femme sensible mais déterminée. Si j’ai pu être frustrée au début de ne plus suivre les aventures d’Almah (héroïne des Déracinés), la déception s’est vite envolée en découvrant la personnalité de sa fille. Catherine Bardon signe un second tome addictif et tout aussi riche que son premier roman.

 

Et la vie repris son cours

Jour après jour, Ruth se félicite d’avoir écouté sa petite voix intérieure : c’est en effet en République dominicaine, chez elle, qu’il lui fallait poser ses valises. Il lui suffit de regarder Gaya, sa fille. À la voir faire ses premiers pas et grandir aux côtés de ses cousines, elle se sent sereine, apaisée.
En retrouvant la terre de son enfance, elle retrouve aussi Almah, sa mère, son énergie et ses projets pour lesquels elle se démène sans compter. Petit à petit, la vie reprend son cours et Ruth – tout comme Arturo et Nathan – sème les graines de sa nouvelle vie.
Jusqu’au jour où Lizzie, malade, réapparaît. Dès lors, Ruth n’a de cesse de remettre son amie sur pied et s’y emploie avec tout l’optimisme qui la caractérise.
Roman des amours et de l’amitié, Et la vie reprit son cours raconte la construction et les chemins de traverse qu’emprunte parfois la vie, de défaites en victoires, de retrouvailles en abandons.
Guerre des Six-Jours, assassinat de Martin Luther King, premiers pas de l’homme sur la lune, chute de Salvador Allende… Catherine Bardon entrelace petite et grande histoire et nous fait traverser les années 1960 et 1970.

 

 

« Chaque fois que je pensais à lui, et c’était souvent depuis que j’étais rentrée, c’était une petite douleur. Il me manquait terriblement. […] Sa silhouette dégingandée, ses yeux myopes derrière ses lunettes, ses « Por Dios ! », ses « querida », ses mauvais jeux de mots, ses répliques de cinéma. C’était comme une partie de moi dont j’étais amputée. Je me demandais souvent comment un homme, qui n’était même pas mon petit ami, pouvait me manquer à ce point. »

 

Un retour aux sources.

Après plusieurs bouleversements personnels, Ruth a rejoint sa terre natale, la République dominicaine. Son objectif ? Reprendre La voix de Sosua, le journal local lancé par son père des années avant elle. Rapidement, Ruth rencontre Domingo, le frère d’Arturo, et trouve avec lui un équilibre longtemps recherché. Mais la sérénité de sa nouvelle vie est perturbée par l’arrivée de Lizzie, fragile et malheureuse.

Amoureuse, travailleuse et mère de famille épanouie, Ruth joue en plus le rôle de grande sœur pour son amie d’enfance. Abîmée par la drogue et l’alcool, Lizzie a développé une personnalité bipolaire, que seuls les médicaments semblent apaiser. Consciente d’être son unique lien, Ruth s’est donnée pour mission de soigner son amie à l’aide de son mari médecin.

A l’image de l’épaisseur de l’ouvrage (plus court que les précédents), le texte de Catherine Bardon se fait plus léger dans ce troisième opus. Des chapitres concis d’une ou deux pages ; un enchaînement de faits historiques qui ne s’imbriquent pas dans l’histoire de Ruth et ses proches ; et des épisodes survolés m’ont détachée de la fresque familiale proposée initialement par l’auteure.

Un roman moins abouti, plus commercial diront certains, un poil décevant mais qui donne tout de même envie de découvrir le quatrième et dernier tome de cette incroyable saga (Un invincible été, éd. Les escales, 2021). Affaire à suivre…

 

Avez-vous lu ces deux tomes ?

Commentaires (3)
Laptitedrillon2022-04-03 10:29:35Répondre

Je viens de lire L'américaine un an après Les déracinés et c'est vrai qu'il se dévore encore plus vite que le 1er. J'ai beaucoup apprécié les questionnements identitaires et l'amitié avec Arturo.
Hâte de decouvrir la suite.

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mademoisellelit2022-04-05 09:41:50Répondre

Je viens justement de recevoir le quatrième et dernier tome de la saga ! J'avais été déçue par le 3ème. J'espère que ça se termine en beauté. :)

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Fexine2021-12-02 21:03:45Répondre

J'avais adoré le premier tome. J'attends d'avoir un peu de temps devant moi pour lire le deuxième qui est dans ma PAL. Et ta chronique me donne encore plus envie !

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mademoisellelit2021-12-03 09:58:22Répondre

Attention, le deuxième se dévore encore plus vite que le premier ;)

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Sabrina2021-11-29 21:53:10Répondre

Merci pour cette chronique ! Je vais me laisser tenter.

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mademoisellelit2021-11-30 09:05:07Répondre

J'en suis ravie ! Ça augure de belles heures de lecture pour vous. ;)

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