Grand-père – Marina Picasso
Quatrième de couverture :
Picasso, le plus grand génie du siècle, vu à travers les yeux d’une enfant, Marina, sa petite-fille. En 1973, à la mort du peintre, elle a vingt-deux ans. Pendant trente ans, elle se tait. Il lui aura fallu toutes ces années pour mettre des mots sur sa souffrance, pour caresser avec une émotion infinie et pleine de pudeur cette cicatrice. De la manière la plus intime, la plus terrible, Marina Picasso écrit jusqu’au-delà de la douleur, là où se trouve aujourd’hui sa liberté : ses enfants et ceux du bout du monde.
De l’artiste à l’homme…
En écoutant l’épisode du podcast Vénus s’épilait-elle la chatte ? consacré au peintre espagnol, je découvrais l’homme derrière l’artiste. Interpellée par certains passages cités de Grand-père de Marina Picasso, je gardais sa lecture dans un coin de ma tête. Le week-end dernier, en visite au Musée Picasso à Paris, je tombais sur l’ouvrage et me le procurais.
Après trente ans d’un silence assourdissant, la petite-fille de Pablo Picasso témoigne, aidée de Louis Valentin. En 1973, lorsque l’artiste décède, suivi de son petit-fils Pablito, Marina s’enfuit. Une courte vie à Londres et deux enfants plus tard, les angoisses ressurgissent sans prévenir. Quatorze années d’analyse auront été nécessaires à la jeune femme pour éclore enfin.
« Ma mère, elle, portait le nom de Picasso comme on porte une médaille, médaille qui la hissait sur les plus hautes marches de la paranoïa. En épousant mon père, elle avait épousé Picasso. Dans ses bouffées délirantes, elle n’admettait pas qu’il ne veuille pas la recevoir ni lui offrir la « grande » vie qu’elle méritait. Fragile, perdue et déséquilibrée, elle devait se contenter d’une partie de la maigre pension hebdomadaire que mon grand-père versait pour maintenir son fils et ses petits-enfants sous sa domination – et dans la plus grande indigence. J’aimerais tellement un jour vivre sans ce passé, marcher sans ces béquilles. »
Doit-on séparer l’homme de l’artiste ? Peut-on encore apprécier l’œuvre du peintre, si magistrale soit-elle, après avoir lu sa petite-fille ? L’objet du livre, précise-t-elle, n’est pas de dire du mal de Pablo Picasso, ou de démystifier son travail. Par ses confidences, Marina veut raconter ce qu’elle a vécu. Dans la pauvreté la plus surprenante, la petite fille s’est longtemps sentie coupable du poids qu’elle représentait pour ses parents. Pablo Picasso, emprisonné dans sa cage dorée de La Californie, au côté de son épouse Jacqueline Lotte, n’avait qu’une seule préoccupation : son art. Paulo, le fils et chauffeur privé du peintre, devra se rabaisser à quémander son salaire des années durant.
Outre le manque d’argent de ses parents et la folie de sa mère, Marina a également souffert de l’indifférence de son grand-père. Si elle ne s’est jamais retrouvée dans aucun des tableaux, dessin ou esquisses de l’artiste, elle regrette surtout les refus de visite dominicale. Jacqueline Lotte, devenue plus tard Madame Picasso, leur laissait régulièrement porte close car « Monseigneur fait la sieste« . Celui qu’elle appelait son « soleil » ou son « maître » sera intransigeant avec tous, interdisant à son fils ses rêves de pilote, et, plus tard, les études de médecine de Marina.
Derrière une réelle blessure, l’auteure se souvient des moments plus heureux auprès de sa grand-mère Olga. Elle lui rend hommage avec émotion. Et, sans filtre, elle décrit les longues semaines d’agonie de son frère Pablito, dont la mélancolie berçait son quotidien depuis longtemps.
Dans un récit fragile et touchant, Marina Picasso livre son histoire avec pudeur, sincérité et transparence. Aujourd’hui, l’apaisement trouvé, la petite-fille du mythe veut avancer. J’ouvre dorénavant un œil neuf sur les œuvres du peintre, sans pour autant boycotter son travail.
Connaissiez-vous cette facette de l’artiste ?