Échecs, Victor L. Pinel : Mon avis
Quatrième de couverture :
La vie, comme le jeu d’échecs. Facile à apprendre, amusant à jouer, difficile à gagner… impossible à contrôler ! Les portes d’un tram s’ouvrent et un jeune homme flashe sur une femme qu’il ne reverra plus. C’est le point de départ de ce récit choral où les protagonistes, tous en train d’échouer dans leurs relations personnelles, sont comme les pièces d’un jeu d’échecs. Les pions se demandent si ce n’est pas le moment de sacrifier une pièce pour continuer à avancer. Les fous se croisent sans vraiment se trouver. Le cavalier, libre, capable de sauter au-dessus des autres pièces, mais vulnérable car, aussi insaisissable qu’il soit, un cavalier peut être pris par un simple pion. Ils avancent tous, se confrontent, se déplacent dans leur vie comme sur un échiquier. Ils sont tous connectés sans même le savoir et vont jouer une partie qui va changer leur vie.
Coup de génie.
Dessinateur espagnol, Victor L. Pinel s’est fait connaître en France en travaillant sur Le plongeon, le projet de Séverine Vidal publié en 2020 chez Grand Angle. Échecs est paru le 23 août dernier dans la même maison d’édition.
Résidente en EPHAD, Mme Dubois ne veut plus quitter sa chambre depuis qu’on lui interdit cigarettes ou verres d’alcool. Aigrie, acariâtre même, elle refuse les activités de groupe et les échanges avec le personnel. Alors qu’il intervient en tant que bénévole à la maison de retraite, Samir tente une approche auprès de la vieille dame. Le jeune homme aimerait beaucoup apprendre à jouer aux échecs, grâce à la table de jeu qui se trouve devant Mme Dubois…
La partie démarre : roi, reine, tour, fou et pions entrent en scène. Petit à petit, le dialogue se noue entre les deux joueurs. Guidées par les explications de la spécialiste, les pièces se croisent, se décroisent, se chevauchent. L’échiquier reprend vie…
« Toutes les options pourraient être les bonnes ! Il n’y a pas une seule option correcte. Il n’y a pas une seule partie.
Un fou… un cavalier…une tour… la dame… Toutes les pièces sont différentes… elles n’ont pas la même valeur.. mais à la fin elles sont toutes importantes. Même un pion peut te faire gagner la partie. Toutes différentes mais au fond… toutes… pareilles. »
Si le coup de cœur fut d’abord visuel – l’objet livre est magnifique -, j’ai vite compris que le fond était aussi réussi que la forme. Derrière des couleurs automnales, un trait de dessin moderne et une palette pastel toute douce, Victor L. Pinel déploie un scénario au mécanisme parfait. En déplaçant les jetons de son échiquier, Mme Dubois fait progresser les aventures des différents protagonistes de la bande dessinée. Le kinésithérapeute de la résidence, sa directrice en plein divorce, un acteur au succès mondial, une jeune guitariste, une lectrice passionnée, etc. Et en se croisant, ils influencent sans le savoir la vie des autres…
J’ai été bluffée par la créativité de l’auteur et l’originalité de son ouvrage. L’histoire est à la fois touchante, prenante et décrite avec beaucoup de finesse et d’intelligence. Dans sa BD, Victor L. Pinel évoque la vieillesse, l’homosexualité, le mariage, la fidélité ou encore la réussite. C’est réalisé avec bienveillance et plein d’humanité.
Échecs est le reflet d’une société qui s’entraide, où chacun a un rôle à jouer pour son prochain. Mon plus gros coup de cœur graphique de l’année, assurément !
A lire aussi : mon dernier coup de cœur BD datait de mars 2022 et il était signé Alicia Jaraba. L’autrice nous emmenait en Amérique latine avec son ouvrage Celle qui parle dont je vous parlais par ici. En préparant cette chronique, j’ai appris que la dessinatrice était en réalité la compagne de Victor L. Pinel… Un couple brillant !
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Cette bande dessinée vous tente ?
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