La poésie française au XXe siècle – Apollinaire, Aragon & Prévert
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Inspirée par ma rencontre récente avec Adélaïde Simon de Bessac, passionnée de poésie, je me suis plongée dans les recueils de trois célèbres poètes français : Guillaume Apollinaire et son fameux Alcools, Louis Aragon avec Elsa et Paroles de Jacques Prévert.
Quel bonheur de découvrir ces mots ! Je vous en parle aujourd’hui avec les miens…
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Changement de format pour vous parler – et c’est inédit – de poésie. Loin de mon univers habituel, je n’ai pas voulu faire une chronique sur chacun de ces trois ouvrages. J’ai préféré vous partager les mots de ces auteurs qui ont le plus raisonnés en moi et vous rédiger un bref ressenti. J’espère que si ce n’est pas déjà le cas, cela vous aura donné envie de les lire 🙂
Ma sélection s’est portée sur trois poètes contemporains français, un peu par hasard. J’attends maintenant tous vos conseils pour en découvrir d’autres.
« Les colchiques
Le pré est vénéneux mais joli en automne
Les vaches y paissant
Lentement s’empoisonnent
Le colchique couleur de cerne et de lilas
Y fleurit tes yeux sont comme cette fleur-là
Violâtres comme leur cerne et comme cet automne
Et ma vie pour tes yeux lentement s’empoisonne
Les enfants de l’école viennent avec fracas
Vêtus de hoquetons et jouant de l’harmonica
Ils cueillent les colchiques qui sont comme des mères
Filles de leurs filles et sont couleur de tes paupières
Qui battent comme les fleurs battent au vent dément
Le gardien du troupeau chante tout doucement
Tandis que lentes et meuglant les vaches abandonnent
Pour toujours ce grand pré mal fleuri par l’automne »
J’aurais pu, c’est vrai, vous partager le poème le plus connu de Guillaume Apollinaire, Le pont Mirabeau, repris en chanson par Marc Lavoine. J’ai préféré vous offrir Les colchiques.
Des trois recueils que j’évoque, Alcools est sans conteste le plus complexe, édité d’ailleurs avec un lexique en fin d’ouvrage, pour aider à la compréhension de chacun. Les textes de Guillaume Apollinaire y sont chargés et le langage parfois très soutenu. J’ai aimé ses poèmes plus légers, comme Les fiançailles dédié à Pablo Picasso ou Automne.
L’écrivain traite avec beauté de la mort, de la nature ou encore des femmes.
« Tu m’as regardé de tes yeux jusqu’à l’horizon déserts
De tes yeux lavés du souvenir
Tu m’as regardé de tes yeux d’oubli pur
Tu m’as regardé par-dessus la mémoire
Par-dessus les refrains errants
Par-dessus les roses fanées
Par-dessus les bonheurs bernés
Par-dessus les jours abolis
Tu m’as regardé de tes yeux d’oubli bleu
Tu ne te rappelles rien de ce qui fut
Ô bien-aimée
Ni les gens ni les paysages
Tout est parti de toi comme les bras des fumées
Tu demeures
Et parcours le ciel pour la première fois
De tes yeux de lave et de lenteur
Les monde est devant toi comme si tu le pensais sous tes paupières
Comme s’il commençait avec toi devant toi
Jeune éternellement de ton regard paisible
Et je suis là jaloux de lui de sa beauté
Avec mes pauvres photos jaunies dont tu te détournes
Pour voir les nouvelles prairies
C’est promis je ne parlerai plus du passé
Tout part d’aujourd’hui sur tes pas
Ce qu’il me reste de vie est un pli de ta robe
Rien encore n’eut lieu je te rencontre enfin
Ô mon amour je crois en toi »
Quoi de plus beau en littérature que des poèmes d’amour ? Louis Aragon en a écrit des dizaines, dédiés à son épouse, Elsa Triolet. Ce sublime ouvrage réunit quelques uns de ses plus beaux textes. Il m’a été difficile de faire un choix sur celui que j’allais vous recopier. Tous m’ont touchée en plein cœur et auraient mérité leur place ici. L’amour transpire entre les lignes de l’auteur. Ses mots sont pudeur, adoration et sensualité.
Le recueil est court mais il est de loin mon préféré des trois. Il me tarde d’en lire davantage. Quel autre livre de Louis Aragon me conseillez-vous ?
« Alicante
Une orange sur la table
Ta robe sur le tapis
Et toi dans mon lit
Doux présent du présent
Fraîcheur de la nuit
Chaleur de ma vie. »
Jacques Prévert joue et s’amuse avec les mots. Si le poème choisi reflète plutôt une magnifique déclaration d’amour, ses textes sont surtout emplis de jeux de mots, de pirouettes avec la langue française et d’humour bien placé. Le poète ne s’économise pas. Ses œuvres sont longues et proches parfois du format de la nouvelle.
Prévert c’est l’enfance et les poèmes appris par cœur, puis récités dans la cour d’école. Une madeleine qui m’a fait du bien et que je recommande à tous.