Le goûter du lion, Ito Ogawa : Mon avis
Quatrième de couverture :
Ce qui fait de ce livre grave et pudique un roman solaire, c’est d’abord le lieu : l’île aux citrons dans la mer intérieure du Japon, qu’il faut gagner en bateau ; et encore, l’image magnifique de l’union de la mer, du ciel et de la lumière : la mer scintillante, illuminée par un incroyable sourire, surplombée par la Maison du Lion, ce lieu de paix où Shizuko a choisi de venir pour vivre pleinement ses derniers jours en attendant la mort.
Avec elle, nous ferons la connaissance des pensionnaires – ses camarades, ses alliés et pour tout dire, sa nouvelle famille – ainsi que de la chienne Rokka qui s’attache à elle pour son plus grand bonheur. En leur compagnie, il y aura aussi les goûters du dimanche où grandit peu à peu son amour de la vie quand on la savoure en même temps qu’un dessert d’enfance, une vie qui aurait le goût de la fleur de tofu, d’une tarte aux pommes ou des mochis-pivoines.
Avec la délicatesse d’écriture que nous lui connaissons dans ses précédents romans, Ogawa Ito entraîne peu à peu Shizuko sur un chemin de poésie dont la mélodie possède la voix grave et conciliante d’un violoncelle ; un chemin apaisé comme pour dire la gratitude d’exister.
Une histoire lumineuse.
Dès le printemps, j’ai su que la rentrée littéraire 2022 aurait une saveur particulière. L’annonce du retour d’Ito Ogawa avecLe goûter du lion, c’était la promesse de quelques heures de douceur dans mes lectures estivales. Je ne m’y suis pas trompée…
Condamnée par un cancer incurable à l’âge de 34 ans, Shizuku décide de passer ses derniers instants sur l’île aux citrons, dans la Maison du Lion. Dans ce pensionnat pour personnes en fin de vie, la jeune femme se fait dorloter, chouchouter, et échange avec d’autres malades. Chaque dimanche, une coutume réunit tous les pensionnaires pour déguster le goûter choisi par l’un d’entre eux. L’occasion, souvent, de replonger une dernière fois dans l’insouciance de l’enfance…
« Un avion traçait une ligne blanche dans le morceau de ciel bleu que j’apercevais depuis la fenêtre du bateau. Jamais plus je ne pourrais traverser le ciel de cette manière. Je me suis surprise à envier ceux qui pouvaient sauter dans un avion et partir en voyage sans se soucier du reste. Puis j’ai été frappée par la pensée que le bonheur, c’était d’avoir la certitude qu’il allait toujours y avoir un lendemain. »
Si Shizuku pense avoir accepté sa condition, les questions sur la mort affluent à son arrivée dans la Maison. A l’approche du grand départ, l’héroïne s’interroge sur l’après. La rencontre avec la petite Momo, le producteur de vin Tahichi ou encore la chienne Rokka lui apporteront finalement les réponses attendues.
Avec sa poésie et sa délicatesse habituelles, Ito Ogawa déploie un roman lumineux sur un sujet universel et grave. Loin du récit larmoyant, le texte est beau et plein d’humanité. L’apprentissage des autres, la réflexion sur soi et la résilience sont au cœur du livre. La nourriture, omniprésente dans la littérature japonaise, tient aussi une place à part ici.
Le changement de traductrice (Déborah Pierret Watanabe remplace Myriam Dartois-Ako) opéré par la maison d’édition après cinq ouvrages consécutifs n’altère en rien le plaisir de lecture. Ce nouveau Ito Ogawa est un de ses meilleurs crus, à déguster sans modération ! Un magnifique coup de cœur, dans lequel l’art d’écrire de jolies choses avec simplicité excelle !