Mon mari, Maud Ventura : Mon avis
Quatrième de couverture :
« Excepté mes démangeaisons inexpliquées et ma passion dévorante pour mon mari, ma vie est parfaitement normale. Rien ne déborde. Aucune incohérence. Aucune manie. » Elle a une vie parfaite. Une belle maison, deux enfants et l’homme idéal. Après quinze ans de vie commune, elle ne se lasse pas de dire » mon mari « . Et pourtant elle veut plus encore : il faut qu’ils s’aiment comme au premier jour. Alors elle note méthodiquement ses » fautes « , les peines à lui infliger, les pièges à lui tendre. Elle se veut irréprochable et prépare minutieusement chacun de leur tête-à-tête. Elle est follement amoureuse de son mari. Du lundi au dimanche, la tension monte, on rit, on s’effraie, on flirte avec le point de rupture, on se projette dans ce théâtre amoureux.
Une folle passion.
Alors que nous évoquions le féminisme lors d’un petit déjeuner littéraire, Aurélie, une abonnée, est venue défendre le premier roman de Maud Ventura. J’avais aperçu Mon mari de nombreuses fois sur les réseaux sociaux et en librairie, sans être attirée par sa lecture. Dans l’assistance ce jour-là, trois lecteurs, convaincus comme Aurélie, confirmaient à coup de hochement de tête tous ses dires. Ils nous décidaient à eux quatre de le lire.
Lundi, mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi et dimanche. Folle de son mari et persuadée qu’il la trompe, la narratrice nous embarque dans sa semaine, énumérant chaque jour les preuves irréfutables de l’adultère. Mais que se passera-t-il dimanche, pour que le récit prenne fin ?
Dans un rythme effréné, tels les sept jours d’une semaine, Maud Ventura déploie un texte vif, où le suspense s’installe et les aventures de ce couple nous aspirent. L’héroïne, amoureuse éperdue de son mari depuis quinze ans, trouve en lui récemment un certain abandon. Elle en est assurée, malgré sa taille de guêpe, son brushing impeccable, son régime alimentaire et tous ses efforts au quotidien, son mari va voir ailleurs. Et lorsqu’un ami lui demande sur le ton de la blague à quel fruit il pourrait comparer son épouse, et que celui-ci répond une clémentine, la cocue y voit un signe supplémentaire !
« Je suis amoureuse de mon mari. Mais je devrais plutôt dire : je suis toujours amoureuse de mon mari. J’aime mon mari comme au premier jour, d’un amour adolescent et anachronique. Je l’aime comme si j’avais quinze ans, comme si nous venions de nous rencontrer, comme si nous n’avions aucune attache, ni maison ni enfants. Je l’aime comme si je n’avais jamais été quittée, comme si je n’avais rien appris, comme s’il avait été le premier, comme si j’allais mourir dimanche. »
Derrière les rires, le lecteur se questionne. Les doutes de la narratrice relèvent-t-ils de la folie ? Jusqu’où peut-elle aller pour obtenir la vérité ? Un drame se joue-t-il entre les murs de la maison familiale ?
L’auteure s’amuse, joue avec nos nerfs et offre un final éblouissant, ultime rebondissement à cette semaine décapante. Tantôt attachante, tantôt attendrissante, la protagoniste inspire aussi de la pitié, cachée derrière tous ses artifices. Et son mari, joyeux dindon de la farce, peine finalement à exister.
Une écriture incisive, un scénario inattendu et une héroïne machiavélique, Mon mari a tout d’un grand roman et promet à son auteure une jolie carrière. Un livre directement placé dans mon top 10 de l’année 2021, grâce à sa puissance et son originalité.